Écrit par l'équipe P-Val

Interview de Sandra Ottavi, DRH de Buffalo Grill

 

Juillet 2020

 

 

 

 

« Nous nous sortons plutôt bien de la crise car le sentiment d’urgence nous a poussé à être encore plus agiles et innovants que d’habitude »

 

P-Val : Bonjour Sandra. Comment s’est passé le confinement chez Buffalo Grill ?

Sandra Ottavi : Comme tout le monde, nous avons reçu la nouvelle du confinement comme un choc énorme le samedi 14 mars où nous avons réalisé en quelques minutes que nous étions face au mur et que nous avions 24h pour fermer nos 350 restaurants ! Nous avons réuni la cellule de crise au siège et avons travaillé toute la journée du dimanche pour organiser la fermeture de la totalité de nos Buffalo et mettre en place la gouvernance de crise de l’entreprise. L’engagement de nos équipes a été impressionnant et leur efficacité extraordinaire !

Notre activité ayant été totalement arrêtée depuis ce jour, nous avons dû mettre en Activité Partielle, c’est-à-dire au « chômage technique » la très grande majorité de nos collaborateurs qui sont donc restés à la maison pour beaucoup d’entre eux presque 3 mois. Dans les restaurants, seul un membre de l’encadrement continuait à travailler 1h par jour pour assurer la maintenance du restaurant et le suivi de quelques tâches administratives. Au siège, nous avons également activé pleinement les dispositifs d’activité partielle. Personne n’a travaillé, à quelques exceptions près qui sont restés mobilisés jour et nuit pour assurer la gouvernance et permettre à l’entreprise d’être debout et forte pour assurer la reprise. Sur le terrain, les 4 directeurs de régions et leurs responsables RH ont continué à travailler quasiment 7j/7 pour répondre aux questions de toutes les équipes et commencer à préparer l’avenir.

 

P-Val : Comment avez-vous fait pour maintenir l’implication des collaborateurs qui ne travaillaient pas ?

Sandra Ottavi : Très vite, nous nous sommes dit que la seule façon de nous en sortir était de nous obliger à réfléchir différemment, de sortir des sentiers battus pour transformer cette crise en opportunité et imaginer un autre modèle. Nous en avons profité pour concrétiser des projets qui nous tenaient à cœur mais que nous n’avions pas pris le temps de mener à bien en période normale où chacun a la tête dans le guidon. Par exemple, dans l’urgence, nous avons réactivé notre réseau social Yammer qui était très peu utilisé. Nous avons lancé une grande opération de communication pour inviter les 7000 collaborateurs de l’entreprise à venir rejoindre la communauté Buffalo Grill et des milliers de salariés se sont peu à peu connectés pour grossir les rangs des groupes, qui proposant des challenges de recettes chères à Buffalo, qui animant une communauté musicale ou encore de fans de lecture ! Nous avons aussi permis aux plus sportifs de participer à des cours de sport sur Zoom avec notre coach spécialement dédié aux collaborateurs Buffalo !

Par ailleurs pendant cette longue période d’isolement il était crucial que notre Directeur Général continue à informer tous les hommes et les femmes de l’entreprise de la marche de Buffalo Grill et des actions mises en place pour rester à flot pendant cette période inédite. Jocelyn Olive, notre directeur général, prenait la parole une fois par semaine par écrit et en vidéo pour rassurer les 7000 salariés et les tenir en énergie en expliquant l’avancée de tous les projets liés à la réouverture.

Très rapidement nous nous sommes aperçus que la situation devenait intenable économiquement pour certains foyers ; nous avons donc mis en place un fonds de solidarité pour nos collaborateurs les plus démunis. Ils pouvaient appeler un numéro unique et une assistante sociale montait des dossiers sur tous les sujets urgents : logement, endettement, etc. Buffalo Grill a débloqué des sommes importantes pour les gens qui étaient vraiment dans le besoin.

D’un point de vue business, la crise nous a incité à accélérer le développement d’activités connexes comme la vente à emporter ou la livraison à domicile qui restaient des segments encore sous-exploités et qui « en avaient sous le pied » ! Les équipes marketing et excellence opérationnelle ont totalement remodelé les process opérationnels et nos clients se sont jetés sur l’offre ! Nous avons multiplié le chiffre d’affaire de cette activité par 3 ou 4 et la tendance se confirme encore aujourd’hui ! Ainsi, nous devons rester prudents mais nos perspectives de vente pour l’été sont meilleures que ce que nous pouvions espérer initialement.

 

P-Val : Vous avez aussi profité du dispositif FNE pour former toutes vos équipes…

Sandra Ottavi : Oui, 2500 collaborateurs ont été formés grâce à ce dispositif, en deux temps : avec un partenaire spécialisé nous avons formé à nouveau toutes nos équipes des restaurants sur toutes les bases métier : règles d’or du service, nouveaux process hygiène et sécurité, gestion des conflits, techniques de vente, etc. Nous avons intégralement adapté et revu les modules de formation en mixant du présentiel et du digital (vidéo, quizz, cours à distance, …) Les plus assidus gagnaient des tablettes Samsung ! Pour les collaborateurs du siège, nous avons travaillé avec P-Val sur le management à distance.

 

P-Val : Comment s’est passé le déconfinement et la réouverture des restaurants ?

Sandra Ottavi : Je crois que nous étions bien préparés. Nous nous sommes organisés pour accueillir nos clients dans les conditions sanitaires requises : mesures de distanciation, port du masque, marquages au sol, etc. Les équipes des services support ont peu à peu repris le travail pour apporter l’aide nécessaire aux équipes opérationnelles dès que la date d’ouverture a été connue. Au siège, dès que la restauration à table a rouvert, nous avons voulu envoyer un signe fort à nos collaborateurs pour dire à chacun : « vous êtes important pour Buffalo Grill ! » et nous avons mis en place un principe de solidarité : tous ceux qui avaient travaillé à 100% les derniers mois sont passés à 80% pour souffler un peu et permettre aux 150 collaborateurs du siège de reprendre au moins 1 jour par semaine, progressivement, tout en maintenant un équilibre économique lors de la première phase du déconfinement où l’activité restait encore incertaine.

Au final, la très grande majorité de nos collaborateurs sont soulagés de retrouver leur lieu de travail et heureux de revoir leurs collègues !

 

P-Val : Au siège aussi ?

Sandra Ottavi : Comme pour toutes les entreprises, le télétravail a été plus ou moins bien vécu selon les conditions dans lesquelles il s’est déroulé. Plusieurs de nos collaborateurs veulent continuer à télétravailler au moins partiellement. D’autres sont très contents de revenir au siège. Le siège de Montrouge a rouvert dans le respect strict des règles sanitaires, avec un système d’équipes tournantes 2j/semaine : l’équipe A travaille au siège le lundi et le mardi alors que l’équipe B prend le relais le jeudi et le vendredi. Le mercredi , la présence s’organise sur la base du volontariat.

 

P-Val : Et pour le futur ? Ce fameux « monde d’après » ?

Sandra Ottavi : Nous allons surtout capitaliser sur les enseignements de la crise et sur nos réussites : sur le plan des affaires, nous allons miser de plus en plus sur les nouveaux services tels que la vente à emporter ou la livraison à domicile. Nous allons aussi accélérer la digitalisation du parcours clients : au lieu d’y aller prudemment et pas à pas, nous allons franchir plusieurs étapes d’un coup et proposer à nos clients des parcours vraiment innovants ! Sur le plan social nous allons pérenniser les dispositifs d’accompagnement des collaborateurs en difficulté. Et en termes d’organisation, pour les services de Montrouge mais aussi des Directions régionales nous avons lancé des ateliers de travail pour inventer et construire ensemble l’organisation mixte de demain. Cette période nous a démontré que le télétravail était possible et efficace dans certains cas. Nous cherchons donc à bâtir avec nos équipes une organisation équilibrée qui valorise à la fois la liberté de chacun dans le choix de plages de travail à distance mais aussi le respect des règles et des responsabilités communes qui permettent de conserver l’amour du maillot Buffalo et le sentiment d’appartenance. Certaines tâches se prêtent au télétravail, c’est certain : les tâches déjà formalisées, individuelles, l’exécution des opérations courantes, etc. mais le lien social doit perdurer et certains projets nécessitent un travail collectif en présentiel.

 

P-Val : Et comment voyez-vous l’activité de vos restaurants à la rentrée ?

Sandra Ottavi : Pour l’instant, tout va bien ! Nous avons quasiment fait un sans-faute sur la réouverture et la gestion de la crise. Nos clients sortent et profitent à plein du beau temps et se comportent davantage comme des cigales que comme des fourmis pour le moment. Nos restaurants sont structurés pour permettre la distanciation sociale : nous avons de grands espaces dotés aussi de compartiments (en mode calèches du far-West) qui se prêtent bien au contexte. Et puis l’ADN de Buffalo, c’est cette atmosphère chaleureuse unique qui colle tout à fait à ce que recherchent nos clients qui viennent d’être privés de sortie et de contact pendant plusieurs mois !

En ce qui concerne la rentrée, bien entendu nous avons réfléchi à plusieurs scenarii, certains moins favorables que d’autres et avons imaginé des organisations différentes selon les cas qui pourraient se présenter. Nous sommes prêts et nous restons confiants !